Malgré un léger crachin et en l’absence de la moindre plaque de neige, des milliers de spectateurs enthousiastes ont assisté samedi matin au départ des 167 concurrents des 2ème Legend Boucles de Spa, le type d’épreuve historique réconciliant le grand public avec le rallye. On se serait cru un jour de Liège-Bastogne-Liège tant il y avait du monde dans la côte de La Redoute. Hotton avait sorti sa fanfare pour une véritable après-midi de fête dans une ambiance bon enfant. Même en travaux, Francorchamps avait fait le plein. De public et de spectacle. Et la célèbre étape forestière de la Clémentine brillait de mille feux avec un formidable show son et lumière jusqu’au milieu de la nuit. Les nostalgiques ont ravivé la flamme. Et les nouveaux venus ont été séduis par ce rallye d’un autre âge.

Le superbe plateau plein de noms ronflants d’hier et d’aujourd’hui a malheureusement été vite décimé, les abandons et faits de course se succédant dès la première boucle de l’après-midi. Souvent malmenées, les « anciennes » mécaniques n’ont plus la fiabilité des voitures modernes. Même à une moyenne de 70 km/h un peu trop facile pour les ténors…

Ainsi, après les forfaits de dernière minute de Renaud Verreydt et de Delbar (voiture ne leur convenant pas), on regrettait les abandons trop rapides de Bouvy (moteur), Gaban (idem), Maes (problèmes de crevaison et d’équipier) et Sterckx (premier leader puis 3ème à l’issue de la 1ère boucle) dont le préparateur, craignant une casse moteur, préféra remettre sa BMW sur la remorque.

Gros soucis d’emblée aussi pour Didi qui prit dès la RT2 la pénalité maximale de 300 points, sa Fiat 131 Abarth refusant tout service durant une heure suite à un problème de bobine. Mais le père de Larry put reprendre sa route pour signer quelques excellents chronos avant de renoncer définitivement sur bris de boîte de vitesses. On soulignera aussi le jusqu’auboutisme de François Duval et de l’équipe de Francis Listrez ralliant l’arrivée après un changement de… moteur à l’assistance de Hotton. « J’ai dû finir avec 80 chevaux, mais c’est fou comme ils sont motivés c’est gars-là. Chapeau à l’équipe. Je me suis bien amusé,» se marrait Dudu saluant ses supporters par de fréquents petits coups de klaxons.

L’arrêt fut brutal et dans des circonstances nettement moins heureuses par contre pour trois des principaux animateurs de l’épreuve : Patrick Snijers, premier leader, Xavier Bouche (d’emblée dans les profondeurs du classement suite à une grossière erreur de son équipier) et Jean-Pierre Van de Wauwer, tous trois arrêtés par la police et privés de permis de conduire pour excès de vitesse… en liaison. Il nous restera heureusement le bon souvenir de passages tout à fait en ordre. Et du bruit rageur du V6 MG dans la Clémentine.

Dès l’entame de la 2ème boucle, la lutte pour la victoire allait donc se circonscrire entre la Porsche 911 de Marc Duez et l’Opel Ascona 400 de Marc Timmers. Un match très serré. A quatre RT du but, après une erreur coûtant une quinzaine de points au lauréat de l’an dernier, les deux hommes pointaient encore à égalité. Et c’est le Duze qui allait finalement avoir le dernier mot en signant les derniers meilleurs chronos pour finalement s’imposer avec un avantage d’un peu plus de 8 points, soit 8 petites secondes.

« Super course… de régularité, » s’exclamait l’Ardennais volant au moment de monter sur la plus haute marche du podium sur le coup de… 2h30 du matin. « On n’a pas fait de faute. L’auto n’a pas connu le moindre problème. Bravo à tout le monde et spécialement à mon équipier John Muth. Il fallait vraiment être deux pour gagner ce rallye nettement plus haletant que mon dernier ici. C’était en 1983 avec la Quattro sous la neige. Je crois que j’avais trois quarts d’heure d’avance. »
Battu de très peu, Marc Timmers n’a pas aimé devoir trop souvent lever le pied. Ce qui lui fit d’ailleurs commettre une erreur lui coûtant peut-être un 2ème succès consécutif. « Bravo à Marc Duez. Je suis content que ce soit lui qui me batte. Même s’il a fallu freiner trop souvent à mon goût, on s’est tout de même bien amusés.»

Troisième à 46 points, Bernard Munster nourrissait également quelques regrets après avoir perdu 76 points dans Creppe suite à une erreur de moyenne. « C’est dommage cette histoire, » confiait le Courtraisien dont la Porsche tourna toute la dernière boucle sur trois cylindres. « Sans cela, je l’aurais emporté. »

Un peu plus loin on retrouvait encore une Porsche, celle du surprenant pistard Jean-Michel Martin, puis la Manta Ba… Tos du toujours aussi spectaculaire Guy Colsoul et l’étonnante petite Mini d’Alexandre Leens, privé de la 4ème place après avoir écopé d’une pénalité de 300 points pour un CP manquant.

Grand habitué de l’épreuve, François de Spa a encore tiré le meilleur parti de son Escort MKI. On peut en dire tout autant de Pierre Sevrin et Gilles Terlinden. Pour leur tout premier rallye ensemble, les associés du Delahaye Racing Team classent leur Porsche Racing Old à une belle 8ème place.

Et nos deux invités vedettes ? Après une belle et très longue journée, Thierry Boutsen (12ème) et Jean Ragnotti (9ème) rejoignaient l’arrivée les traits tirés mais heureux d’avoir accompli la mission qui leur incombait.

Sans des soucis de suspensions, Jeannot, longtemps aux environs de la 6ème place et toujours généreux dans l’effort, aurait pu espérer bien meilleur résultat aux commandes de son Alpine Berlinette A110. «La dernière boucle, il l’a vraiment faite pour moi car l’auto était devenue inconduisible, elle ne tournait plus, » confessait son copilote belge Philippe Bouvier achevant ainsi sa carrière dans le baquet de droite sur une expérience très positive.

Quant à Thierry Boutsen, très bien assisté par son jeune fils de 16 ans Kevin, il évita tous les pièges. Barré en puissance par sa petite 911 de 1968, handicapé par sa méconnaissance du terrain, notre ex-pilote de F1 progressa au fil des RT et se rappela même au bon souvenir de tous à… Francorchamps, un circuit où même en sens inverse il reste performant.

« C’était génial. Magnifique. Je suis très heureux d’avoir partagé ce bon moment avec mon fiston qui a été à la hauteur de… Willy Lux. Au sens figuré ! Je ne pouvais rêver meilleur équipier. Je suis à l’arrivée, sans une gratte et avec plein de souvenirs dans la tête. Je ne pouvais pas espérer beaucoup mieux avec cette voiture équipée durant tout le rallye de pneus… neige pas vraiment appropriés, » souriait notre ex-vainqueur de Grand Prix battu de seulement 8 points par son équipier Christian Kelders, celui grâce à qui toute l’opération a pu être menée.

Enfin, notons encore qu’en régularité « classique », soit à du 50 km/h de moyenne, le victoire est revenue à la BMW 2002 Ti d’ Eric Van Peer (copiloté par Joseph Lambert) pour 6 dixièmes de points devant l’Opel Ascona de l’équipage Lareppe-Borremans, encore des vieux de la veille.

Le classement final Performance: 1. Duez-Muth (Porsche 911) 56.4; 2. Timmers-Smets (Opel Ascona 400) + 8.43; 3. Munster-Leyh (Porsche 911) + 46.63; 4. Martin-Chaumont (Porsche 911) + 188.30; 5. G. Colsoul-Colsoul (Opel Manta 400) +205.28; 6. Leens-Lopes (Mini Cooper) + 413.04; 7. De Spa-Grogna (Ford Escort) + 460.46; 8. Sevrin-Terlinden (Porsche 911) +542.68; 9. Ragnotti-Bouvier (Fra-Bel/Alpine Renault A110) +587.60; 10. Melse-Melse (P-B/Porsche 911) +603.05; 11. Kelders-Kerkhove (Porsche 911) +652.10; 12. Th. Boutsen-K. Boutsen (Porsche 911) +660.74; 13. De Sordi-Gosse (Opel Kadett GTE) + 735.46; 14. Warroquiers-Franchi (Ford Escort Gr.4) +746.16; 15. Gonay-Gonay (Volvo 122S) +868.32; 16. Van Bellingen-Custers (Opel Manta 400) + 1087.64; 17. Duval-Bourdeaud’hui (Skoda 130) + 7250.08

Le classement final 50 km/h : 1. Van Peer-Lambert (BMW 2002 Ti) 18.65 ; 2. Lareppe-Borremans (Opel Ascona) +0.60; 3. Reuter-Vandevorst (Porsche 914) +2.35; 4. Deflandre-Mathy (Alfa Romeo Coupe Bertone) +2.39; 5. Devillers-Ninane (Ford Escort) +2.95